♫ Unfold your own myth ♫

A sa plus grande surprise, la divinité à laquelle il s'adresse n'agit pas comme la diva capricieuse à laquelle il s'attendait. Et bien que dans les agissements de cette dernière, il dénote une forme de nonchalance presque naturelle, le simple fait que la curiosité de ses propres propos ait été suffisante pour garder son attention est déjà un très grand pas. Il n'aura dès lors pas à essuyer un refus catégorique ou à supplier quiconque de bien vouloir lui porter l'attention qu'il mérite et ça l'arrange.

Son sourire s'élargit tandis qu'il détend ses membres pour reprendre une position plus naturelle que cette révérence théâtrale, le tout se concluant sur de légers petits sauts sur place accompagnés de succincts applaudissements exprimant l'excitation ainsi que la joie.

- Parfait !

La tonalité de sa voix s'emballe et manque de dérailler, la jeune muse postant son poing fermé devant ses lèvres alors qu'un raclement de gorge cherchant à masquer son excès d'enthousiasme vient brutalement rompre cette effervescence naissante.

Rapidement, il tente de calmer ses ardeurs et de paraître un rien plus contrôlé, craignant que sa passion ne vienne entraver ses chances de réellement bénéficier de l'aide nécessaire à la réalisation de son projet. Il faut dire que la divinité à accepter de l'écouter, rien de plus. Rien n'est encore gagné.

- Ahem... Ce que je veux dire, c'est... Je ne saurais comment vous remercier de m'accorder cette audience ainsi que votre attention, grande déesse. Si vous me le permettez, laissez-moi donc vous exposer mon idée !

Chassez le naturel et il revient au galop, c'est un petit peu ce qui caractérise parfaitement Cléon. C'est aussi quelque part ce qui le rend plutôt instable aux yeux de tous. Un moment, il arbore une énergie calme, silencieuse, presque sereine et la minute qui suit, le voilà explosant d'énergie, incontrôlable, dont les idées et les mouvements partent dans tous les sens.

A mesure que ses paroles sont prononcées, de grands gestes viennent décorer, illustrer ses propos, se faisant même l'expression directrice de la muse en question. Sa vie, son existence ne se résument qu'au paraître dont la réputation incarne le rouage central d'intégralité de cette machinerie. Tout est prétexte à montrer toujours plus, fricotant avec les excès, prenant le thé et les gâteaux avec les manières et se munissant d'une volonté d'éblouissement auprès d'autrui comme s'il s'agissait là d'une pure nécessité.

Poings sur les hanches, petits allers-retours devant la déesse de la beauté toujours allongée sur le canapé, il finit par marquer une pause afin de s'assurer de ne pas perdre l'attention qui lui est porté. Sourire en coin, il s'assure avec brio d'offrir à son interlocutrice une assurance inspirant la confiance quand bien même à l'intérieur de sa tête, il ne s'agit que d'un foutoir sans nom.

- En tant que muse du spectacle, j'ai l'intention de donner une fête en ces lieux. Cependant, malgré le talent indéniable que je possède lorsqu'il est question de l'organisation de ce genre d'évènements, je compte assurer mes arrières en m'alliant à un partenaire.

Un instant, il laisse planer une sorte de suspens dramatique avant de poursuivre ses explications.

- Et c'est là que tu interviens... Tu connais du monde, tu es connue de tous et par-dessus tout, tu détiens ce charme naturel qui fait que personne ne pourrait résister à la moindre de tes demandes.

A nouveau, quelques secondes de répit sont nécessaires à son analyse auprès des réactions émises par Aphrodite, en plus de l'attente des potentielles questions ou remarques émises par cette dernière. Une fois chose faite, Cléon reprend son monologue afin de déterminer les tâches respectives de chacun ainsi... que de la sorte de récompense destinée à la jeune femme dans le cas où celle-ci accepte de participer à son idée sans broncher.

- Pour ce qui est de la logistique, je m'en occupe. D'ailleurs, je pensais à notre salle commune comme salle de réception pour cette soirée. En soi, celle-ci nous appartient, cela limiterait ainsi les interruptions craintes ou les interventions indésirables. De ton côté, tout ce que tu aurais à faire serait d'user de tes charmes pour alpaguer le plus de candidats possibles.


Soudainement, une fois sur son propre terrain de jeu, la petite muse initialement frêle et encline à la soumission semble reprendre du poil de la bête, insufflant -à son insu- à ses intonations une forme d'autorité alors en opposition avec son apparence juvénile et presque mignonne. Comme si, en un claquement de doigts, le jeune Cléon était passé de l'apprenti manquant de confiance en lui au maître assuré qui connaît son business sur le bout des doigts. L'orgueil, alors en compétition avec lui-même ainsi qu'avec autrui, se révèle, se relève et s'étend de leur morceau de conversation jusqu'à l'entièreté de la pièce. Son désir est marqué par un déterminisme à faire peur ; il ne s'agit dès lors plus d'une possibilité, mais d'une quasi obligation masquée par une volonté à l'apparente innocence de faire profiter, à qui le veut bien, une soirée mémorable.

Dans un espoir d'intégrer à la planche de son exposé le dernier clou permettant de sceller leur pacte à jamais, celui-ci s'avance doucement, le visage pourtant marqué par une espièglerie difficile à cacher. Arrivé au niveau de la divinité, il se penche légèrement et gracieusement, accompagné par un geste délicat, délivrant au creux de son oreille la partie plus croustillante de la soirée. Ce qu'il délivre est inaudible pour quiconque ne se trouverait pas dans l'intimité de leur proximité, mais il est désormais plus qu'évident que le sujet de ces messes basses n'est pas destiné à tout public.

De quoi, il l'espère, parvenir à rendre l'organisation de cette soirée aussi nécessaire auprès d'Aphrodite qu'elle ne l'est déjà pour lui, dictée par des motivations somme toute... très différentes.