Il faut qu'on parle...
Mégara et Achille

La nuit a été pénible. Après avoir passé des heures à me défouler sur un mannequin d'entraînement, j'ai essayé de dormir. Les souvenirs de ce que j'ai vécu à l'île d'attraction reviennent en moi comme une infernale boucle. Ce rêve était si beau... Cette gloire, cet enfant, cette femme... Je les veux. Tous les trois. Mais boucle par boucle, c'est comme si mon rêve se transformait en cauchemar. D'abord un détail, ses cheveux. Puis une statue en mon honneur, notre honneur, changée, comme si cette gloire était pas la mienne. Comme si on avait décidé que c'était pas mon mérite, mais celui d'un autre. Puis un réveil dans une pièce qui aurait rien à voir avec mon domaine. Ensuite, Athéna, une de mes amies en qui j'ai le plus confiance remplacée par Acéso. Une autre amie, mais qui aurait jamais utilisé les mêmes mots que la déesse de la sagesse. Jusqu'à voir le corps de Mégara changé... Puis le mien... Puis moi, dans le corps de Mégara. Je suis sûr que si j'ai pu sortir de ce cauchemar, c'est uniquement grâce au pouvoir de ma guerrière. Je sais de quoi il est capable pour l'avoir subi moi-même. Par deux fois. Mais depuis le combat contre le requin géant et les sirènes, je sens que quelque chose a changé en moi. Je sais pas si c'est à cause du combat qu'on a livré tous ensemble, mais je me sens parfois mal. Je sens que quelque chose attaque mon esprit, parfois. Et j'aime pas ça. Je crois qu'on a tous été impactés par la journée d'hier, d'une manière ou d'une autre. Arès aussi a l'air d'avoir pris cher. On en a pas parlé. C'est pas notre fort, les mots. Grosse ambiance dans notre dortoir avec Hector au milieu. Athéna a l'air de s'en être assez bien sortie, elle. Elle m'a dit bonjour ce matin comme d'habitude. Je lui ai dit qu'aujourd'hui, j'allais voir Mégara et elle avait l'air très contente de l'apprendre. Elle m'a donné quelques conseils. Qu'est-ce que je ferai sans elle et sa sagesse..? Je sors de mon bain les cheveux mouillés. J'aurais pu avoir un très mauvais souvenir de l'eau avec ce qui s'est passé hier alors j'ai l'impression que ça s'est pas si mal fini que ça pour moi... Mieux que pour la cascade aux énigmes, déjà. Quoique... Je termine de m'habiller une fois sec et je me regarde dans le miroir. J'ai vraiment l'air d'avoir passé une sale nuit... C'est quand je regarde le miroir que je vois la tête d'un petit gars, mon portrait craché en gamin, me parler. "On y va, Papa ? Maman nous attend !"

"Maman"... Il parle de Meg. Ce gamin, c'est mon fils. Celui que j'ai vu dans l'hypnose des sirènes... Je sais qu'il est pas réel. Je l'ai tué de mes propres mains dans mon cauchemar. Alors pourquoi est-ce qu'il me hante encore ? J'en sais rien. Mais à chaque fois qu'il vient et repart de ma tête, j'ai l'impression qu'il donne des coups de marteau que j'entends dans mon crâne. Mais le voir là, maintenant, l'entendre là, maintenant, ça me rappelle quelque chose de capital. Ce que je veux dire à "Maman", comme il dit. Après un profond baiser dans mon rêve, je lui ai dit quelque chose que je voulais pas oublier. J'ai réussi à m'en souvenir. Je dois lui dire dans le monde réel. Je suis prêt. Ça a assez duré... Je fais un oui de la tête devant mon miroir. Oui, Patrocle. On va voir Maman...

On a rendez-vous aujourd'hui aux Jardins du Printemps. Ça change de la forêt ou de la plage. J'ai pas mis grand chose sur moi. Un simple pantalon, mes bottes, un haut et une veste légère. Un rendez-vous aux jardins, ça veut dire que j'ai pas besoin de ramener des fleurs. Je vais sûrement lui en cueillir quand j'y serai et elle pourra en mettre dans ses cheveux. Ça lui va si bien...Alors que je suis en chemin, je vois cette version miniature de moi marcher comme le moi de l'époque de la Garderie. Un pas fier, assuré, dynamique... Aujourd'hui, je suis un peu plus lent, plus mesuré. Peut-être que c'est la fatigue mentale qui joue un peu... Mais il a l'air d'être impatient de la voir. Mon sourire en coin le confirme. Moi aussi, j'ai hâte de retrouver Mégara. Ma guerrière. Mon amie. La femme que j'aime... Pas de centaure énervé à l'horizon. Personne, même. On est seuls. C'est parfait... Mini moi commence à courir quand il la voit. Quand je la vois. J'entends son cri de joie dans ma tête. Un "Maman ! Maman !! MAMAAAAAAAAN !!!" qui me fait encore plus sourire. Est-ce que cette illusion m'a montré le futur avant de se brouiller..?

J'arrive à sa hauteur. Elle est assise sur un banc. Je lui souris et essaie au mieux de faire comme si nos problèmes d'hier étaient derrière nous. Bien sûr, moi, physiquement, je vais bien. Rien peut me blesser... Je m'installe à côté d'elle avant de lui parler

— Bonjour, Mégara...

Premier conseil d'Athéna. Ne pas être trop brusque. Oui, je tiens à elle. Oui, elle le sait. Mais elle est sûrement encore fatiguée d'hier et les événements ont pas dû l'épargner, comme un peu tout le monde qui devait se castagner avec le requin. D'ailleurs, j'ai pas revu tout le monde depuis... Je me demande ce qu'elle a vu, elle. Si elle a vu les mêmes choses que moi ou pas. Elle a disparu longtemps. Qui sait ce qu'elle a pu subir ? Je pose doucement ma main sur son avant bras en lui souriant. Pas trop brusque. Je suis là, mais je te laisse respirer. Même après la nuit qu'on a tous passée, elle est belle. Ses yeux sont toujours aussi beaux. J'engage la conversation avec une question. Je veux savoir comment elle va.

— T'as réussi à te reposer un peu, cette nuit ? T'as l'air très fatiguée...

Elle peut pas me mentir. Pas sur ça. Je vois bien que sa nuit était sûrement aussi mauvaise que celle des autres. En tout cas, la mienne était aussi mauvaise qu'on l'imagine, perdu dans ma tête, entre rêve et cauchemar. Avec la vraie Mégara et celle de l'illusion des sirènes pour me tenir compagnie. Je chasse de mon esprit la vision sanglante que j'ai en écoutant la réponse de la Maîtresse des Mots. La vraie. La seule.

Il faut qu'on parle...
Mégara et Achille

Je m'y attendais. Elle a eu une mauvaise nuit. Je crois qu'on a tous eu le même problème. Sauf Athéna qui m'a dit qu'elle a pas trop mal dormi. Elle ment pas, alors c'est sûrement vrai. Je me râcle la gorge pour répondre. Mais la fatigue se lisait sur son visage.

— J'pense qu'on a tous eu le même genre de nuit...

Elle pose sa main sur la mienne alors que mes doigts sont en contact avec son autre bras. J'aime sentir sa peau sur la mienne. C'est agréable. Elle a les mains douces. Je lui souris comme d'habitude. Tout va bien. Elle est là. Je suis là. C'est là qu'elle me fait savoir pourquoi on se voit aujourd'hui. Je lui souris. Elle aussi veut me le dire ? J'entends ce petit gars parler dans ma tête... "Vas-y, Papa !" Il m'encourage. Je me rappelle des conseils d'Athéna. C'est le moment. Je me lance. Mon autre main quitte le banc pour aller dans ma poche, empoignant une pomme... "Donne lui cette pomme. Elle comprendra."

— J'suis d'accord, Meg, j'dois te dire...

Mais elle parle d'abord. Son regard est pas le même. Je sens qu'elle va mal. Depuis le temps qu'on se voit, je sais quand quelque chose va mal. Je sais pas quoi. Mais un truc va pas. Ça, j'en suis sûr. Elle parle de nous au passé. Dans sa mémoire. Je peux pas m'empêcher de la regarder dans les yeux. Elle me parle avec son coeur... Mais plus elle avance, moins je comprends. J'entends qu'elle est pas aussi heureuse qu'elle le croit. Des événements se sont déroulés lui ont fait se rendre compte de trucs. Elle parle de l'île ? De la cascade ? De la rage que j'ai en moi ? Du combat contre le requin ? D'autre chose ? Mais j'arrive pas à lui demander quoi sur le moment. Elle s'excuse et baisse les yeux. J'entends quelque chose se casser... Rien est tombé... Rien s'est fait frapper...Je vois une larme rouler sur sa joue.

— Mais... Tu pleures, Mégara..?

Je pose ma main sur sa joue, doucement, comme pour cueillir sa larme. Elle pleure... "Dis Papa..? Pourquoi Maman, elle pleure ? Pleure pas, Maman !" Je prends une profonde respiration. Je la regarde, l'air inquiet. Et je tire doucement sa tête vers moi pour la faire pivoter. Je veux voir ses yeux. C'est pas une conversation qu'on doit avoir en se cachant. Je lui parle d'une voix douce. Elle compte pour moi.

— Regarde moi, s'teuplait... On a toujours été honnêtes l'un pour l'autre, la confiance, c'est sacré... J'veux comprendre. Me mens pas...

Je veux savoir. Je veux savoir pourquoi elle pleure. Pourquoi elle a l'air d'avoir mal. Pourquoi elle a dit... Ces mots. J'essaie d'avoir l'air rassurant, comme j'ai toujours voulu être et je me mets à lui parler, en douceur quand on a rétabli le contact visuel dans les yeux de l'autre.

— Tu... T'es pas heureuse..? J'ai fait quelque chose de mal, Meg..? C'est quoi, le problème, il vient d'où ? De moi ? De toi ? Ou...

Je l'accuse pas. Je suis pas violent. Je l'agresse pas, je lui pose juste mes questions. Elle a toujours répondu quand j'avais des questions. C'est son truc, les mots. Elle est forte. Ça marchera pas. C'est ce qu'elle a dit... Alors elle a vu la pomme que je voulais lui offrir ? Elle a compris que je l'aimais ? Sans même avoir dit même pas la moitié d'une explication... Y a un problème. Je dois mettre la main dessus. Je veux qu'elle arrête de pleurer... Le petit gars et moi, on est d'accord. On veut pas la voir pleurer... C'est là que j'ai un éclair dans la tête. Et si..?

— Ou peut-être que... T'aimes quelqu'un d'autre..?

Je laisse un long silence passer. Elle me mentira pas. Entre nous, ça a toujours été honnête. Nous, ça s'est fait vite. J'ai mis un moment avant de me rendre compte de ce que c'était vraiment. J'ai su ce que c'était... Mais trop tard. Et ce qu'il y a autour de nous a fait le reste. Mais maintenant... J'ai besoin d'une autre info...

— Est-ce que ça veut dire que tu me détestes..? Qu'on se verra plus jamais..?

J'aime pas cette idée... Vraiment pas... J'ai peur qu'elle réponde oui. J'ai l'impression de sortir d'une longue session d'entraînement dans laquelle j'ai donné aucun coup. Aucun...  Mais qu'est-ce qui m'arrive..?

Il faut qu'on parle...
Mégara et Achille

On s'est toujours dit les choses. Des fois, je comprenais pas forcément, mais elle avait toujours des mots pour se faire comprendre. On a jamais eu besoin de se mentir. Ni elle, ni moi. On est pas comme ça. L'honnêteté, c'est précieux. Elle me mentira pas.

— Je sais. J'ai confiance en toi pour ça...

J'ai besoin de savoir pourquoi. J'ai besoin de comprendre. Nos caractères étaient différents. Mais y avait pas que ça. J'ai posé la question. Peut-être que j'aurais pas dû poser la question. Mais je l'ai fait. Elle lui a coupé le souffle... Nos regards se fixent. On peut pas reculer. Pas là. Pas maintenant. Elle hésite. Et elle répond. Elle peut pas me mentir. Elle dit la vérité... Elle aime quelqu'un d'autre. Mégara s'excuse. Encore une fois. J'entends quelque chose se casser une nouvelle fois. Mais encore une fois, rien s'est fait frapper. Aucun objet s'est retrouvé au sol après une chute. Rien... Je réponds à mon tour.

— Oh. Je... J'vois. J'ai toujours su que t'avais le courage d'une lionne. Faut au moins ça pour réussir à me dire ça dans les yeux sans jamais les baisser...

J'ai toujours admiré son courage. C'est pas pour rien que je l'appelle "Ma guerrière". Auprès de n'importe qui de sanguin comme moi, elle aurait pu être en danger à apprendre ça. Mais pas moi. Elle sait que jamais je lui ferai du mal. Et pourtant, elle m'a vu trébucher. Elle m'a vu me mettre en colère... Y a un respect entre nous... Ce que j'ai entendu me plaît pas. Je sais pas ce que je ressens encore sur ça. Mais je dois, au nom de ce que j'éprouve pour elle, réagir. Je peux pas partir comme ça... Je la regarde toujours dans les yeux. Mon sourire en coin est resté tel quel. Ce qui compte, c'est son bonheur.

— Qui que ce soit... J'préfère que tu sois heureuse avec lui que malheureuse avec moi, Mégara. Sincèrement...

C’est ça, l’aimer. Elle sait que je pense le moindre de mes mots. C’est pas mon fort, les mots. C’est son cheval de bataille. Tout ce dont elle a besoin, c’est d’écouter ce que je dis. Je parle avec le cœur. Et je sais qu’elle fait pareil. Elle pleurerait pas si c’était pas vrai… Ma peur, c’est de la perdre. Qu’elle me déteste. Mais ses mots restent dans ma tête. Elle me déteste pas. Juste… Elle est pas amoureuse. Elle est d’accord pour qu’on continue à se voir. Mais c’est ce que moi je pense qui a l’air de l’inquiéter… Je ferme les yeux et respire. Garder son calme. Conseil d’Athéna. Réfléchir avant de parler. Un conseil que j’oublie souvent. Mais cette fois, je veux pas mal répondre. Je passe mes bras autour de ses épaules avant de la serrer doucement contre moi. Je dois lui répondre. Je peux pas la laisser dans le doute. Moi non plus, j’aimerais pas être laissé seul dans la brume...

— Tu m'as apporté beaucoup de choses...  Depuis que j'te connais, ma vie a pas mal changé, et en bien. Avant d'te connaître, ma vie, c'était des combats, de l'entraînement pour m'amuser et être le meilleur. Avant, y avait rien d'autre qui comptait pour moi, enfin, presque... Aujourd'hui, c'est parce que je sais que j'ai quelqu'un à protéger. Grâce à toi, j'ai appris que je pouvais me servir de ma force, de mon pouvoir pour aider les autres. Je me sens... Utile ? Important ? J'ai l'impression de faire partie d'un truc plus grand.

Je la serre encore un peu plus fort. Je sais que je pourrais la casser si je fais pas attention alors j’y vais doucement. Je sens son cœur qui bat contre le mien. Pas en même temps. Athéna me dit ça aussi. Que j’ai quelqu’un à protéger, que je veux faire ce qui est bien, ou je sais pas quoi. Mais avec Mégara, c’est… Réel. Je comprends ce que ça fait en vrai. C’est pas la première personne que je protège. Mais c’est d’abord avec ce qu’elle m’a apporté que j’ai compris ce qu’Athéna voulait dire. Sans Mégara, je l’aurais peut-être jamais complètement compris… J’ouvre les yeux. Le gamin que j’ai vu me regarde. Je me revois plus jeune, à la Garderie. Je me dis que j’aurais aimé connaître Mégara à cette époque. Je continue.

— C'est un peu comme si... Comme si j'avais passé ma vie à lire un seul bouquin plusieurs fois et qu'après, quand t'es venue, tu m'as dit qu'y avait une bibliothèque remplie à côté de moi en me donnant envie d'aller lire les autres bouquins. Tu m'as appris tellement de choses... Tout ce que t'as fait pour moi depuis qu'on s'est rencontrés, ça me fait me dire que t'as su voir au dessus de ce que j'étais en apparence. Alors pour tout ça...

Je m’arrête. Je desserre mes bras autour d’elle. Je veux la regarder dans les yeux pour lui avouer. Je veux pas regretter. Nos regards se croisent une nouvelle fois. Il est temps de lui donner une vraie réponse.

— Je t'aime, Mégara. Je peux pas te détester... J'suis pas un de ces tarés qui déclencherait une guerre pour une peine de cœur. Je vais pas te mentir. J'aurais aimé qu'on soit plus que ça. Mais pas au prix de t'perdre. J'veux te garder dans ma vie. J'veux pas casser ça. J'veux pas qu'on arrête de se voir pour ça...

"Pour ça". Comme si c'était... Pas grave. Je crois que je tiens plus à elle qu'à un nous deux. Tout briser pour l'amour une femme. C'est sûrement un truc que plusieurs Tamarisc pourraient faire... Mais pas moi. Je veux pas être de ceux là. Mon sourire en coin toujours là, j'essaie de rester positif. Elle a toujours su ce que je pensais. Mais quand je le dis, je suis sûr qu'elle sait...

— J'm'en fous de savoir qui c'est. Mais il a intérêt à prendre soin d'toi... Autrement, il va tâter d'mes phalanges ! J't'ai promis que j'serai toujours là pour toi si t'as besoin d'moi. C'est pas mon genre de revenir sur ma parole...

Je pousse un léger rire. Mon fameux "Heh !" qui vient comme un souffle, pas comme d'habitude. Je sais pas qui elle aime. Mais il a de la chance, ce quelqu'un d'autre. Par contre, je pense vraiment qu'il a intérêt à prendre soin d'elle. Mégara, je l'ai jamais lâchée. J'ai toujours été là pour elle. Pour la protéger et l'aider du mieux que je peux. C'est pas les deux crétins qui nous ont bousculés au bal de printemps, le sphinx de la cascade, le centaure ou le requin qui diront le contraire. On s'en prend pas aux proches d'un Tamarisc. Je l'ai jamais laissée tomber. C'est pas aujourd'hui que je vais commencer. C'est tout ce que je peux lui offrir en retour de tout ce qu'elle m'a donné. Ma loyauté. Un truc qui se reprend pas une fois qu'on l'a donné. Je pose ma main sur son épaule. Il faut que j'y aille...

— Je crois que j'vais rentrer, j'vais pas m'éterniser... Tu prends soin de toi, hein ?

On est arrivés au bout du chemin. Elle m'a dit ce qu'elle voulait me dire et j'ai fait pareil. Je crois qu'on va surtout avoir besoin de réfléchir, enfin, elle plus que moi, de ce qu'on a fait, de ce qu'on a dit. Je me lève et commence à lui tourner le dos. La tête tournée vers elle, je lui parle d'une voix rassurante, le sourire en coin.

— T'inquiète pas pour moi. J'suis invincible, y peut rien m'arriver, j'vais m'en relever !

Pendant une fraction de seconde, mon sourire se fige. Puis il réduit. Quand Je tourne la tête, il a complètement disparu. J'entends quelque chose se briser. Encore une fois. Je prends une silencieuse respiration avant de prendre congé.

— Au revoir. Maîtresse des Mots...

Je commence à marcher pour quitter les jardins. Le petit gars dans ma tête, surexcité quand je suis arrivé traîne des pieds devant moi. Je suis pas plus rapide que lui... C'est sûrement la fatigue. Ouais. C'est ça. C'est la fatigue...