Lorsque Perséphone reprit ses esprits, elle se retrouva cette-fois-ci complètement seule, isolée du reste de ses camarades. Décidément, la soirée était de plus en plus surprenante. Ses souvenirs étaient troubles, elle se rappelait du début de la soirée, ses échanges avec Dionysos avant d'entrer dans la grotte sous la cascade. L'éboulement aussi, qui la sépara une première fois. Et puis Circé... recroquevillée, paniquée. Elle se souvenait avoir tenté de la remobiliser pour qu'elles trouvent ensemble une issue et puis... cette sensation, ce gout étrange qui l'avait prise à la gorge. Tout ceci n'était peut-être qu'un mauvais rêve. Cela en avait tout l'air. Il n'y avait aucune logique, elle avait vécu plusieurs scènes, dans plusieurs lieux dans un laps de temps relativement court...

- Ça n'a aucun sens... dit-elle la gorge sèche.

Elle avait cette sensation de ne pas avoir bu depuis plusieurs jours, sa voix était plus rauque, légèrement cassée. Elle ne put s'empêcher de tousser, comme si un amas de poussières avait envahi ses poumons. Sa respiration lourde faisait également écho dans ce nouvel espace obscure... Elle tenta de regarder tout autour d'elle, mais elle ne distinguait pas grand chose. Une sorte de voile flou perturbait sa vision.

- Il y a quelqu'un ? quelqu'un ? quelqu'un...

Elle prit le temps de se relever, délicatement. Ses jambes étaient engourdies, comme si la gravité ici était beaucoup plus forte. Chaque mouvement lui demandait plus d'effort qu'à l'accoutumé.

- Diony, Circé, Arès ? Arès ? Arès... Ça suffit Echo ce n'est pas drôle du tout ! Du tout ! Du tout...

C'est alors qu'elle vit cette magnifique rose rouge qui luisait dans les ténèbres. La lueur clignotait presque, donnant l'impression qu'elle faiblissait et qu'à tout moment, elle aussi pouvait s'éteindre. Perséphone s'approcha naturellement vers cette dernière, de toute façon, elle n'avait que ça à faire...

- Bonjour toi... alors comme ça tu es toute seule toi aussi... dit-elle d'une voix calme et apaisante que l'écho ne capta pas.

Naturellement, la Déesse du Printemps déposa délicatement le bout de ses doigts sur la fleurs, comme une caresse destiné à la rassurer. Cela peut paraitre étrange, mais pour une Déesse qui fait pousser des fleurs, pas tant que ça !

Après avoir effleuré la fleurs, cette dernière se mit à briller davantage. Comme si la Déesse venait insuffler sa magie à l'intérieur, presque contre son gré, pour se transformer en une sorte d'arme... Peut-être que cette sorte de garde d'épée absorbait le pouvoir pour s'épanouir.

La pièce s'illumina à t-elle point que Perséphone fut aveuglée quelques instants. Une fois que tout redevint sombre, Perséphone mit quelques bonnes secondes à se réhabituer à l'obscurité. Elle se concentra sur l'étrange objet qu'elle tenait toujours de sa main droite. C'était jolie à voir, et une puissante aura magique s'en dégageait. Très clairement, la fleur était bel et bien devenue une arme vivante.

C'est alors que des grognements rompirent le silence dans la pénombre. Elle vit s'animer des silhouettes, qui semblaient être attirées par la lueur que dégageait la fleur en métal. Prise de panique, Perséphone recula et trébucha en arrière. Se retrouvant les fesses contre le sol, elle lâcha par mégarde sa seule source de lumière. Sa respiration s'accéléra, son regard cherchant désespérément les ombres folles dans l'obscurité la plus totale. Paniquée, la Déesse du printemps tapota autour d'elle afin de récupérer l'arme, terrifiée à l'idée de détourner le regard sur ce qui pouvait l'attaquer.

Forte heureusement, elle toucha du bout des doigts la garde de l'épée enchantée et la pointa devant elle. A l'aide de cette dernière, elle parvenait de nouveau à distinguer les ombres. Elle se releva :

— N'approchez pas ! Si seulement Arès était là... il saurait quoi faire...

Plus elle agitait la lumière qui se dégageait du bout du manche, plus les créatures maléfiques s'agitaient. C'est alors que trois d'entre-elles foncèrent sur Perséphone, déterminée à éteindre sa lumière. Dans un hurlement de peur, la Déesse du printemps fit un grand geste circulaire avec la garde en main. Soudain, la fleur devint encore plus souple, encore plus longue, à l'image d'un fouet, tel un ruban lumineux. Les créatures se virent transpercées par l'éclat avant de disparaitre.

— Mais !? Comment est-ce possible ?

Visiblement, la déesse avait compris comment se défendre seule. Cependant, il restait encore des ombres et la lumière qu'avait dégagé son attaque, attisait davantage leur haine.

Ce qu'elle avait accompli jusqu'à présent fût presque inutile. Les ombres qu'elle pensait avoir vaincu se reformaient sous ses yeux. En plus de cela, d'autres ombres apparaissaient ci-et-là, forçant Perséphone à détourner constamment le regard pour ne pas se faire submerger.

Elle était entourée d'ennemis, ils étaient toujours plus nombreux, plus agiles. Jusqu'à ce que l'une des ombres lui attrape la cheville. Un froid glacial l'a fit frissonner. D'un grand geste, la déesse du printemps réutilisa l'arme pour se dégager, lui laissant un court laps de temps afin d'analyser la situation.

Visiblement il n'y avait aucune issue. Tout était beaucoup trop sombre. Bien que son arme lui permettait de voir un peu mieux dans l'obscurité, ce n'était pas suffisant pour voir l'ensemble de la pièce. Se sentant dépassée par les évènements, Perséphone baissa la garde et ferma les yeux :

— Fleur aux pétales sombres, sous la lune diaphane, sors enfin de l’ombre, libère les forces du mal…

C'était incroyable. Perséphone n'était jamais parvenue à utiliser son pouvoir de la sorte. Bien qu'elle ne gérait pas l'ampleur de la zone d'effet, l'arme l'aidait grandement à notamment canaliser sa puissance. Aussi, pour une fois, elle gardait l'esprit clair. Le contrôle sur ses émotions était parfait, à tel point que cela lui permettait, en plus de voir dans l'obscurité, d'analyser tout ce qui se passait.

Les ombres étaient quant à elles, comme absorbées par la fleur, faisant grandir des ronces qui s'épanouissaient dans toute la pièce. Un vrai carnage. C'était aussi beau à observer que terrifiant car le froid de l'hiver était glacial. Toute source de vie était absorbée. Elle en profita pour effectuer quelques tests. Elle se concentra sur une plus petite zone proche des parois afin de faire grandir davantage les fleurs de la mort. Et ce fût une réussite.

La déesse du printemps cessa de chanter tout en gardant son pouvoir actif. Cela lui procurait un fort sentiment de satisfaction, elle se sentait puissante. L'arme perdit tout de même en intensité, et les ronces cessaient peu à peu leur ascension. Les ombres avaient pour ainsi dire, toutes disparues. Il restait toujours une question en suspend, comment sortir d'ici ?